La Cie GRAINE DE MALICE / MALGRAINE est un miroir à deux faces :
Version pile pour le Jeune Public, privilégiant lʼévocation plutôt que lʼanecdote.
Version face pour le théâtre contemporain, porteur de grands textes dʼaujourdʼhui.
« Lʻattention pour les choses suggère le regard sur les êtres »
Georges PEREC
Le théâtre de GRAINE DE MALICE est un théâtre lié au « dérisoire des choses ».
Nos créations sʼamusent à mettre en résonance lʼHomme et lʼObjet, à apprivoiser la banalité du quotidien pour en faire, par la grâce du jeu théâtral, un matériau poétique.
Nos spectacles naissent donc toujours de la mise en adéquation dʼune matière ou dʼun matériau précis avec son symbolisme, sa puissance métaphorique issu dʼun fond culturel inconscient. Il nʼest plus simple élément de décor et en tant que Marionnette nʼest pas économie dʼacteur, mais revêt au contraire le statut dʼélément principal du jeu dramatique et du sens de lʼoeuvre.
Que les jeunes spectateurs conçoivent que, grâce à lʼImaginaire, il existe face aux difficultés de lʼexistence la possibilité dʼun inépuisable réservoir de recréations de rapports humains, est ce que tiennent à véhiculer les spectacles de GRAINE DE MALICE.
Par ailleurs, notre volonté de présenter nos créations pour la toute petite enfance dans des écrins intimistes : une yourte, une tente berbère, un campement nomade, sous une grotte de tissus…, répond à notre préoccupation concernant les conditions de réception des premières émotions théâtrales par celles et ceux qui formeront le public de demain.
Car, pour GRAINE DE MALICE, prendre en compte le jeune public, ce n’est pas seulement porter une attention particulière au choix de l’histoire ou du vocabulaire, c’est aussi prendre en compte la réalité de l’enfance. C’est pourquoi, au gigantisme des grandes salles (fauteuils trop profonds, scènes trop hautes, distance entre l’avant scène et les premiers fauteuils impossible à combler pour que « passe » le spectacle auprès d’enfants plongés dans une obscurité et un anonymat auxquels ils ne sont pas toujours préparés et dont ils n’ont pas les clefs de lecture), la Cie a fait le choix des petites jauges, facteur de proximité, d’intimité même. En réduisant ainsi la séparation entre les comédiens et les spectateurs, pour ne plus former qu’une seule et même communauté, une co-présence, un « être ensemble », nous cherchons à stimuler l’attention et à mieux impliquer le tout jeune enfant dans le spectacle.
D’autre part, le parti-pris de proposer du théâtre dans des lieux transposables partout, nous l’avons également conçu comme une démarche citoyenne, qui s’inscrit (modestement mais consciemment) dans la droite ligne de l’aventure de la décentralisation théâtrale. En effet, il n’est pas nécessairement besoin de plateaux équipés pour accueillir l’un des trois opus de cette trilogie : une salle obscure (même parfois très impersonnelle) suffit pour y implanter notre univers. Et dès lors, ce sont aussi de toutes petites communes rurales qui font parfois l’actualité de nos saisons.
« Pour ma part, jʼai seulement envie de raconter bien, un jour, avec les mots les plus simples, la chose la plus importante que je connaisse et qui soit racontable, un désir, une émotion, un lieu, de la lumière et des bruits, nʼimporte quoi qui soit un bout de notre monde et qui appartient à tous. »
Bernard-Marie Koltès
C’est par cycle de créations que fonctionne MALGRAINE.
Ainsi, en 1995, MALGRAINE ouvrait un triptyque autour de la Shoah avec « Avant la retraite » de Thomas Bernhard. Suivront « Ella » de Herbert Achternbusch, présenté en 1996 dans une gare désaffectée, et « En filigrane… », lecture incarnée dʼextraits de « La douleur » de Marguerite Duras et de « M.D. » de Yann Andréa en 1999. Trois pièces, trois écritures pour mettre en lumière sur le plateau, ici, les banales et humaines certitudes dʼun chef de camps nazi, là, le long processus de déshumanisation des déportés et enfin lʼéprouvante épreuve du retour des survivants des camps, cadavres ambulants.
Puis, cʼest à porter sur scène des textes explorant « lʼespace mental » que nous nous sommes attelé. Cet «espace mental», qui, parce que les écritures qui cherchent à le mettre à jour sʼappuient bien souvent sur une structure fragmentaire et morcelée de la langue (Jean-Luc Lagarce - 2003, Sarah Kane - 2004, Carl Th. Dreyer - 2006), dynamite de fait les lois de lʼunité théâtrale, nécessitant dʼinventer de nouvelles approches de la scénographie, et, au final, de jouer avec les frontières du théâtre.
Enfin, en 2016 et 2017, avec Jarry et Soyinka, MALGRAINE proposait un diptyque sur « l’UBUniverselle soif de pouvoir et d’argent ».